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Le blog des auteurs libres

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Pop rock music, chanson française, biographies express de personnages hors du commun, faits de société


Edith Piaf et les Compagnons de la Chanson: une histoire d’amitié

Publié par Daniel LESUEUR sur 2 Avril 2017, 06:10am

Catégories : #musique, #PEOPLE

« Une histoire d’amour et d’amitié », devrions-nous préciser, car la môme Piaf fut la maîtresse de l’un des neuf. Tout avait commencé pendant la guerre…

 

En 1944, au Gala des Cheminots à la Comédie française, Edith découvre les Compagnons de la Musique, et, évidemment, en grande amoureuse qu’elle était, nouera une idylle avec l’un d’entre eux, Jean-Louis Jaubert.

 

Compagnons de la Musique ou Compagnons de la Chanson ?

Suite à une rupture avec leur « chef » Louis Liébard, les Compagnons de la Musique vont devenir "Compagnons de la Chanson", société coopérative inscrite au registre du commerce. Emballée (et déjà amoureuse de Jean-Louis), Edith ira les applaudir à Paris chaque fois que l’occasion se présentera. Elle et eux s'embarqueront conjointement pour une tournée en Allemagne et dans l'Est de la France, à l'intention des soldats loin de leur foyer. Un long et harassant périple au terme duquel la petite bonne femme (1,47m) considéra que la collaboration s'était avérée suffisamment fructueuse pour qu’elle puisse, humblement, devenir à l’occasion… Compagne de la Chanson.

C’était compter sans le règlement de la société coopérative "Compagnons de la Chanson"

Le conseil d’équipe trancha : pas de fille dans la troupe. Rabrouée, Edith reviendrait quand même à la charge, elle resterait au moins leur marraine durant trois ans, continuant de partager avec eux de nombreux galas (notamment au « Club des Cinq », cabaret parisien dont l’un des propriétaires était Jo Longman, manager de Marcel Cerdan) et les tournées (Suisse, Scandinavie, Amérique) qui se profilaient à l’horizon de 1947, voire 1948 en ce qui concerne les Etats-Unis, où ils se rendront par deux fois, et le Canada. Ensemble ils ont signé un contrat les liant pour dix ans. Mais quel contrat ! Un méchant bout de papier griffonné à la va-vite, et même pas daté (voir document).

Des projets

Edith prévoit de tourner un film avec eux (Neuf Garçons et un cœur) ; elle a également l’intention de leur faire changer leur répertoire, alors constitué de chansons surannées du folklore français telles que Dieu que les mères, Perrine était servante et même Céline, La Complainte du roi Renaud et Margoton s’en va-t-à l’eau, trois vieilleries qu’Edith essaye de ragaillardir par sa présence : ça faisait trop "boy scout", pour ne pas dire ringard.

Les Trois Cloches

Elle leur propose Les Trois Cloches que vient d’écrire à son intention le Suisse Jean Villard. Stupeur et indignation des Compagnons :

  • « Des cloches qui sonnent, qui sonnent, qui sonnent… mais on va avoir l’air de quoi ? »

Et Edith, qui a la réplique facile : « Vous aurez surtout l’air de cloches si vous ne l’enregistrez pas ! »

Mais la coopérative résiste. Edith ne s'attendait sûrement pas à ce qu'ils refusent d'inscrire Les Trois Cloches à leur tour de chant. Le seul moyen de leur faire interpréter la chanson (et, ainsi, quitter l'anonymat, car Edith est persuadée que c'est la chance de leur vie), c'est de la chanter avec eux. Ca, ça ne se refuse pas... sinon, c'eût été un affront.

La tournée américaine

La réaction du public fut à la hauteur de ce qu'attendait Edith ; à tel point que, dans un premier temps, les Compagnons, avec, justement, leur petit côté "boy scout", obtinrent plus de succès aux Etats-Unis qu'Edith elle-même, qui en prit ombrage. Un orage qui menaçait depuis fin 1946. Le 11 octobre, en effet, Edith comme Compagnons s’affichaient pour six semaines au théâtre de l‘Etoile. Mais brusquement, Edith doit être remplacée pour trois jours par Yves Montand : surmenée, elle a perdu la voix et en rend ses amis responsables. La brouille est de courte durée mais l’épisode américain aura du mal à passer. En réalité, les Américains n’ont pas été déçus par Edith, mais décontenancés : elle ne représente en rien l’image qu’ils ont de Paris. Les Compagnons, eux, on peut apprécier leurs chansons sans en comprendre les paroles ; Edith, elle, on l’attendait avec strass et paillettes, elle surgit dans sa misérable robe noire, ses pieds minuscules arpentant la scène comme quelqu’un qui a mis les patins dans un salon trop grand au parquet ciré. Et ses chansons, auxquelles on ne comprend pas grand-chose (elle n’en interprète que deux en anglais), sont d’un triste… d’un triste. Qu’on est loin du gay Paris !

Un faux départ

Consciente de son échec, Edith, en accord avec les Compagnons, décide de ne plus apparaître avec eux pour Les Trois Cloches. Leurs tours de chant sont donc totalement indépendants. De toute façon, au bout de quelques jours, la chanteuse décide de rentrer en France sans honorer son contrat jusqu’au bout ; c’est la première fois depuis le début de sa carrière qu’elle est en prise au doute. Coup de théâtre : un article élogieux à la Une d’un grand quotidien new-yorkais la fait revenir sur sa décision. Mais la rupture avec les Compagnons est consommée, d’autant que l’un d’entre eux, Guy Bourguignon, a commis une gaffe monumentale : à sa petite amie Ginette Richer, une fille qui deviendra l’une des meilleures amies d’Edith, il a écrit « Nos critiques sont meilleures que celles d’Edith, mais je ne sais pas si je dois m’en réjouir » et la phrase est parvenue aux oreilles de la star. Est-il besoin de préciser que, malgré l’annonce de leur mariage faite le 14 janvier 1948 par Jean-Louis, l’idylle entre le Compagnon et la môme Piaf est mourante : Edith a été séduite par John Garfield, l’acteur vedette du Facteur sonne toujours deux fois. Et puis, au « Gourmet » (le restaurant français le plus huppé de New York), sa table étant voisine de celle de Cerdan, elle a rencontré le grand amour de sa vie.


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