Dans son émission "Face A, Face B", Michel Gosselin reçut Ivan Perey pour évoquer l'œuvre de Robert NYEL... Vous pourrez écouter les chansons évoquées en cliquant sur les titres mis en surbrillance.
IP : J'ai eu la chance de rencontrer des auteurs de chansons comme celui-ci lorsque j'ai travaillé « un peu » à Radio France. Il y a de cela quelques années je m'étais intéressé à ces auteurs pas très connus du grand public, comme Robert Nyel et qui pourtant ont écrit des petits chefs-d'oeuvre.
MG : On va commencer par une chanson de Bourvil, de 1959, qui s'appelle « Ma p'tite chanson ».
IP : Oui bien sûr, « Qu'est-ce qu'elle a, mais qu'est-ce qu'elle a donc ma p'tit' chanson ? ». C'est le côté tendre de Bourvil qui je crois a été découvert surtout après sa mort par le jeu des compilations de disques, on a alors vu qu'il y avait des petits chefs-d'oeuvre dans les chansons qu'il avait enregistrées, des petites chansons très tendres, très douces et puis très très bien écrites comme celle-ci, qui décrit une structure amoureuse.
MG ; « Ma p'tite chanson », paroles de Robert Nyel et musique de Gaby Verlor.
IP : On ne peut pas évoquer Robert Nyel sans parler de Gaby Verlor, qui elle aussi a disparu il y a de cela quelques années (06/04/2005), car c'était un tandem, vraiment ils fonctionnaient en tandem, c'est-à-dire qu'ils écrivaient des chansons tous les deux, comme ça arrive – je ne peux pas dire si c'est courant – mais il y a des tandems d'auteurs-compositeurs, comme Jean-Max Rivière et Gérard Bourgeois, on pense aussi à Datin et Vidalin, et puis quelques autres.
Gaby Verlor était une compositrice qui jouait au Caveau de la République à Paris. Et qui écrivait les musiques, et Robert Nyel les paroles. Et je sais que généralement, ils se téléphonaient puisque lui était plutôt basé dans le Sud, il était de Grasse et je crois qu'il a toujours vécu dans le sud de la France et elle était plutôt à Paris et donc il lui dictait ses textes par téléphone, et connaissant la sténo, elle les notait en sténo, elle mettait les musiques sur ces chansons-là, parmi lesquelles celles qu'on va évoquer.
MG : Gaby Verlor venait elle-même d'un duo nommé Verlor & Davril dans les années 50…
IP : Oui, mais Davril, le pauvre, est décédé prématurément (1950) dans un accident et ils ont enregistré quelques disques, formant un duo tout à fait charmant, il existe à ma connaissance un CD de ces chansons (sorti en 1999 chez Marianne Mélodie, épuisé).
MG : Robert Nyel a quelquefois collaboré avec d'autres compositeurs, comme Francis Lai, ça a été le cas pour la chanson « Le droit d'aimer », pour Edith Piaf. C'est une chanson qu'elle avait créée à l'Olympia donc en 62, quelques jours avant son mariage avec Théo Sarapo, elle l'avait présentée en octobre de cette année-là sur la scène de l'Olympia, en même temps que « A quoi ça sert l'amour ». C'est à ma connaissance la seule chanson que Robert Nyel lui a fournie. On sait qu'Edith Piaf avait le « nez » pour trouver de bons auteurs.
MG : Oui c'est ce qu'on dit et on a pu le vérifier souvent.
IP : C'est bien de citer Francis Lai, il doit être le seul compositeur encore de ce monde à avoir travaillé pour Piaf (excepté Charles Dumont).
MG : Edith Piaf a enregistré une autre version de cette chanson « Le droit d'aimer », en 1963, peu de temps avant sa mort.
Parlons maintenant d'une formation pour laquelle Robert Nyel a travaillé, toujours avec Gaby Verlor, il s'agit des Frères Jacques avec « Les sœurs Machin-chose ».
IP : C'est là l'occasion de rendre un double hommage, en plus de celui que nous rendons en ce moment à Robert Nyel, saluons aussi la mémoire de ce cher Paul Touraine qui nous a quittés il y a quelques jours…
MG : Le dernier des quatre.
IP : En effet, le dernier des quatre, à l'âge de 93 ans, je sais qu'il était né en 1923. C'était un monsieur charmant, on l'a bien connu quand il venait souvent à la radio. Les Frères Jacques se sont arrêtés en 1981-82 au moment de leurs adieux à la scène et lui est resté actif en suivant les diverses rééditions CD ou DVD, il venait en parler à la radio. Les Frères Jacques ont eu une carrière extraordinaire et eux aussi choisissaient très bien leurs auteurs, ils ont chanté Ricet Barrier comme ils chantaient Prévert, La Fontaine, Gainsbourg et quelques autres. Et aussi Robert Nyel, il y a une chanson qui s'appelle « La branche ».
MG : On va parler maintenant d'un autre personnage de la chanson, du cinéma, de la télévision, d'origine provençale comme Rbert Nyel, il s'agit de Robert Ripa ; son plus gros succès, c'est « Magali »
MG : Qui date de 1962 et qui a été enregistrée aussi avec succès par son créateur. La même année, Robert Ripa grave une autre chanson due à la plume de Robert Nyel « Entre Rhône et Durance », musique composée par la fidèle Gaby Verlor.
Parlons maintenant de la collaboration Robert Nyel-Henri Salvador avec la chansons « Borme-les-Mimosas".
IP : Qui est beaucoup plus récente : 2003. Quand on écoute les chansons de Robert Nyel on est d'accord pour dire qu'elles datent toutes de la même époque : fin années 50-début années 60. Et puis après il a arrêté le métier d'auteur de chansons, il n'était pas très showbiz, pas le genre à aller dans les cocktails de la Sacem à Paris. Et c'est Henri Salvador, qu'on a redécouvert, que le public a redécouvert, ainsi que les gens du métier, avec ce merveilleux disque qui s'appelle « Chambre avec vue » sorti en 2000, c'était le côté crooner de Salvador. Après, en recherchant des chansons dans ce ton-là, c'est Salvador je crois qui a fait la démarche d'aller retrouver Robert Nyel, alors retiré dans sa Provence, pour lui demander de lui écrire des chansons pour son nouveau disque, dont « Borme-les-Mimosas », extrait de l'album « Ma chère et tendre » en 2003.
MG : On va parler maintenant d'une chanson qui te tient particulièrement à coeur et dont on va écouter la version de Sanseverino « C'était bien (Le petit bal perdu) ».
IP : Ah oui, pour moi c'est sans doute une des plus belles chansons de Robert Nyel, enfin du tandem Robert Nyel - Gaby Verlor, mais je trouve que c'est une des plus belles chansons d'amour qui existe. C'est toujours difficile de dire laquelle est la plus belle chanson d'amour, il y en a tellement et puis on en découvre toujours, mais c'est quand même une petite merveille et à chaque fois je la réécoute avec beaucoup d'émotion, déjà pour des raisons personnelles parce qu'elle est liée aussi à un épisode de ma vie et puis en même temps c'est quand même une chanson très bien écrite. Eh là quand on écoute ces chansons, on se dit : c'est parfait, il n'y a pas un mot à changer, on le voit tout de suite, ce sont des chansons qu'on peut peindre, on voit tout de suite le tableau, on ressent une émotion et puis, ben voilà, ce sont des chansons réussies, c'est difficile à définir, une chanson réussie, c'est un petit miracle, c'est quelque chose qui nous accroche comme ça et qui nous touche. Cela peut être parfois une petite bluette à deux sous qui passe à la radio un matin, on s'arrête, on écoute. Moi ça me fait toujours des petits frissons et cette chanson-là particulièrement. Elle a un double titre, tout le monde l'appelle « Le petit bal perdu », ça a été mis entre parenthèses, mais la chanson a pour titre « C'était bien ».
Elle était destinée à Bourvil, il devait la chanter en premier et puis, pris par le tournage d'un film, il l'a mise de côté. Cette chanson est alors passée sous les yeux de Juliette Gréco qui a voulu la chanter, mais comme vous le savez, l'interprète qui a retenu le titre a une sorte d'exclusivité mais Bourvil l'a laissée à Gréco qui l'a enregistrée un an avant lui, ce qui fait que c'est la version de Juliette Gréco qui a d'abord été connue. Ensuite est venue la version de Bourvil et puis celles d'autres interprètes comme Tom Novembre – qui a consacré un disque merveilleux à Bourvil (que j'aime beaucoup) - et puis plus récemment celle de Sanseverino en 2009 (à suivre en CLIQUANT ICI).