Esther Lekain, Gaby Montbreuse, Paulette Darty, chanteuses de la Belle Epoque

Publié le par Daniel LESUEUR

Un livre vient de sortir qui retrace la carrière des REINES DU 78 TOURS (cliquer ICI) dont Esther Lekain, Gaby Montbreuse et Paulette Darty, stars il y a 100 ans... Toutes trois sont aujourd’hui totalement oubliées.

Dans l’ombre d’Yvette Guilbert, de Damia et de Mistinguett, elles manquèrent de peu de passer à la postérité

Sans la radio et avec un nombre restreint de foyers détenteurs d’un tourne-disque, il était difficile de s’imposer, au début du vingtième siècle.

Une fois révélés quelques grands noms, pour les autres, la célébrité fut éphémère.

Esther Lekain (1870-1960)

Yvette Guilbert eut une fille spirituelle en la personne de Ernestine Nikel, alias Esther Lekain. Plutôt une petite sœur car trois ans, seulement, les séparaient.

Très mince et modestement accoutrée, dotée d'une petite voix charmante, elle fait partie de ces femmes, finalement plus nombreuses qu'on pourrait le penser, qui ne correspondaient pas à l'image qu'on se fait de la chanteuse de la Belle Epoque. Ce décalage, qui repose sur la réserve de son interprétation et sur la sobriété du geste, était son charme. Elle le complétait par une diction impeccable (Yvette Guilbert disait d’elle qu’elle était la Reine des diseuses).

Elle n'abandonna jamais la scène, même si elle ne s'y produisit que sporadiquement : deux ans avant sa mort, elle animait encore le Casino de Paris.

Elle gardait toujours une oreille à l'affût de talents nouveaux ; c'est elle qui découvre Jean Anezin et lui conseille de prendre un pseudonyme, Jean Lumière car sa voix, lui dit-elle, était lumineuse.

Hormis sa version de Ma petite Tonkinoise (Vincent Scotto, 1906) les chansons d'Esther Lekain ne font plus partie de notre quotidien (La Dernière Gavotte, Tout ça n'vaut pas l'amour et C'est un petit béguin) car sa notoriété n'a jamais atteint celle de son modèle Yvette Guilbert.

Gaby Montbreuse (1895-1943)

Comment donc a-t-elle pu être adulée ? Elle n'a pas la dimension de Mistinguett, la classe de Damia, l'originalité de Polaire et d'Yvette Guilbert. Au contraire, elle est pétrie de vulgarité. Mais voilà son secret : sa vulgarité est étudiée et dosée, à tel point que cela devient presque un charme. Et puis elle sait choisir son public. Les « grandes » chantent pour les princes et les rois ; elle, elle chante pour les Poilus et les embrasse à la fin de son spectacle, eux qui ne connaissent que la vie rude des tranchées.

Qu'importe que son physique soit ingrat, que sa voix soit cassée par les abus, elle est drôle, et c'est ce dont on a besoin en ces heures sombres.

Elle reste célèbre pour avoir popularisé en 1917 Je cherche après Titine. Ce succès bien de chez nous vrille les tympans des soldats américains présents dans l'Hexagone à la fin de la Première Guerre mondiale. La rengaine va se propager en Amérique où elle sera connue de tous grâce à son utilisation par Charlie Chaplin dans Les Temps modernes. Si célèbre que Jacques Brel en propose une version revue et corrigée au milieu des années 60.

Paulette Darty (1871-1939)

De son vrai nom Paulette de Bardy, Paulette Darty est aujourd'hui oubliée ; elle laisse au moins un grand succès, Fascination (1905). Retenons surtout qu'elle eut pour pianiste Erik Satie ; déclarant "Le music-hall est aujourd'hui le creuset où bouillonnent les éléments d'une nouvelle sensibilité qui se prépare", il composa pour elle Je te veux (1903).

Son répertoire, principalement constitué de valses sentimentales, fit pleurer les trottins bien après 1908, date à laquelle elle fait ses adieux à la scène. En se retirant, la belle blonde, qui avait été surnommée "la reine de la valse lente", va permettre à une certaine Miss Tinguette d'accéder à la gloire, avec une autre valse, chaloupée celle-là.

Esther Lekain, Gaby Montbreuse, Paulette Darty, chanteuses de la Belle Epoque

Publié dans musique

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