Ann Margret
Ann-Margret n’est pas n’importe qui, loin de là ! Ce fut une très belle femme qui fit craquer Elvis Presley (et, accessoirement, des millions de jeunes gars dans le monde entier). Elle tourna dans des dizaines de films à succès et enregistra plusieurs disques… à échec (la formule n’existe pas, certes, mais pour l’occasion, on peut l’inventer, tant est vaste le décalage entre sa réussite au cinéma et son insuccès au micro). Aux Etats-Unis, elle est si connue qu’elle fut dessinée sous le nom de Ann Margrock dans le cartoon « The Flintstone » (« La famille Pierrafeu »).
Une starlette d’une grande beauté
Ann–Margret Ollson est née en 1941 en Suède. Très jeune, elle se passionne pour le chant, la musique et la danse. Elle part pour les États-Unis à l’âge de 5 ans accompagnée de sa mère. Sa beauté naturelle et son élégance font bientôt d’elle une brillante meneuse de revue à Las Vegas, ce qui intéresse très vite Hollywood.
Au tout début des années 60, elle tourne : « Pocketful of Miracles » avec Bette Davis (1961), « State Fair » (1962) mais surtout « Bye, Bye Birdie » (1963) qui lui amène gloire et fortune.
Un peu oubliée en Europe, elle fit un retour en force en 1975 avec son rôle percutant dans le film « Tommy » tiré de l’opéra rock des Who, une des comédies musicales les plus célèbres des années 70.
Retour sur une carrière éminemment brillante
En raison de la date de son arrivée sur le marché du disque (1961) elle aurait dû directement se mettre au twist sans passer par la case rock’n’roll. Mais son producteur vit en elle une sorte d’Elvis au féminin et lui fit enregistrer « Heartbreak hotel ».
Son premier 45 tours, "I Just Don't Understand", grimpe à la 17è place du hit-parade américain. Pour une débutante, c’est fabuleux.
A Memphis, elle enregistre un album, « And Here She Is...Ann-Margret » (1961) sur lequel elle est accompagnée par le célèbre guitariste Chet Atkins… et par les Jordanaires, choristes d’Elvis.
A partir de là, elle va publier un album chaque année jusqu’à 1966.
En 1963, elle tourne « Viva Las Vegas » avec Elvis Presley. Les témoins présents le jour de leur rencontre disent tous la même chose : « Il y a eu quelque chose d’électrique dans leur regard, un coup de foudre inexplicable » ; inexplicable ? Même blasé, Elvis ne pouvait que tomber sous le charme de cette bombe !
Le couple ne se quitte plus et les journaux annoncent déjà leurs fiançailles.
Or Elvis Presley s’était déjà engagé auprès de Priscilla Beaulieu. Le King largue Ann, "Superstar Sex Symbol".
Rupture et continuité
Continuité au cinéma, car elle ne reste pas plus de six mois sans tourner entre 1961 et 1982. Mais dans le vinyl, elle ne grave plus grand-chose… Symboliquement, la rupture avec Elvis amène une rupture avec le monde du disque : un seul album en 1969… et le suivant dix ans plus tard.
Que s’était-il donc passé ?
Un grave accident
Fin 1972, en concert, elle tombe de la scène et fait une chute d’une hauteur de dix mètres. Il en résulte des plaies multiples, des fractures… et l’obligation de faire appel à la chirurgie esthétique pour refaire son visage. Au total, trois mois d’inactivité… mais surtout l’immobilité totale de la bouche durant une longue période (durant cette pénible période, elle fut nourrie, soit par intraveineuses, soit en aspirant du liquide par un tube). Sans certitude… mais tout porte à penser que le fait de ne pas avoir bougé les lèvres durant une éternité est un des éléments qui a conduit à sa disparition prolongée du monde du disque via la désastreuse séance d’enregistrement que nous allons relater…
Un producteur cancanier
C’est Denny Bruce, celui qui avait faillit produire son album, qui livra ces indiscrétions
« Elle souhaitait devenir une nouvelle Tina Turner mais elle ne chantait pas, elle chuchotait… Enfin, moi j’étais payé pour produire un album. J’ai rassemblé un orchestre, et un bon. Arrivée au studio, Ann-Margret décrète qu’elle ne peut pas chanter avec le casque sur les oreilles et qu’elle veut enregistrer en direct avec les musiciens autour d’elle. Fan de Janis Joplin, de Marilyn Monroe et de toutes les femmes au destin tragique, elle a joué la star, conservant un manteau qui descendait jusqu’aux pieds et une écharpe autour du cou alors qu’on était en plein été. Les musiciens étaient sidérés. Enfin bref, on lui installe le micro, comme elle l’a demandé, en plein milieu de l’orchestre… et juste au moment de chanter la première note, elle s’est évanouie ! La chaleur, le stess ? Son assistante voulait la secourir, la ranimer mais c’était impossible de s’en approcher rapidement en raison de la promiscuité : le lieu est bourré d’instruments coûteux, il était hors de question de renverser une guitare ou une batterie de plusieurs milliers de dollars. Les musiciens, eux, s’étaient rués autour de la belle actrice… mais juste pour la regarder ! J’ai dû jouer des coudes pour arriver jusqu’à elle en hurlant « Ecartez-vous, laissez-là respirer » ! Inutile de préciser que la séance d’enregistrement était terminée !
Une fin d’enregistrement pitoyable
Denny Bruce doit néanmoins remettre le travail pour lequel il a été payé. Il fait enregistrer toute la partie instrumentale par les musiciens. Ann, ensuite, devra chanter par-dessus. Mais comme elle n’avait pas fait l’effort d’apprendre les chansons, elle se contenta d’ânonner les paroles qu’elle lisait sur les feuilles qu’on plaçait près du micro. Le résultat : un désastre ! Bruce, consciencieux, envoya quand même la bande à plusieurs maisons de disques mais il devinait déjà les réponses. Ce disque de 1973 n’est jamais sorti et Ann-margret resta plus de cinq ans sans en enregistrer un autre !